La sidération. L’incompréhension. Un moment de flottement.
Samedi 14 novembre, je me connecte sur internet et je découvre l’horreur. La veille j’allais me coucher en attendant vaguement parler d’une fusillade. Le matin mon écran m’annonce plus de 120 morts, et une nuit d’horreur que je n’arrive pas à imaginer.
La peur s’installe vite. Mon pays est-il en guerre ? Est-ce que les images que je vois de temps en temps à l’autre bout du monde vont devenir mon quotidien ? Le sang, la peur, les morts. Je ne connais pas cela. Je vis en France bordel. Mon quotidien c’est fumer clope sur clope, abuser du café, chambrer mon collègue musulman en lui proposant du saucisson, me moquer de mon président, et râler contre tout et rien. Je suis française, et tout ça c’est dans mon ADN. Quand je faisais mes études en Angleterre, mes potes anglais me disait qu’on était pas normal parce qu’on mangeait des escargots et des grenouilles. Quand je suis allée à New york et que je disais que j’étais française, on me disait « voulez-vous coucher avec moi? » et « baguette de pain ». Quand j’étais en vacances à Bali, on m’a chanté « la vie en rose ». Et là dans ma télé, l’image que renvoie mon pays est la désolation, la peine. Le monde entier est triste pour ma France. Putain mais c’est pas ça mon pays. Comment 8 abrutis délestés de cerveau à la naissance ont-ils pu modifier à tels points la vison du monde sur ma patrie ?
Alors biensûr qu’on a mal, évidemment qu’on a peur. Je ne peux m’empêcher d’imaginer ce que les victimes ont vécus, ce que leur famille et amis endurent. Quand j’entends un policier dire que ce qui l’a le plus marqué au Bataclan, c’était les téléphones portables des victimes qui sonnaient, affichant désespérément des « maman », « papa », « mon coeur », ça me retourne le coeur et le corps. Mais il parait que la peur n’évite pas le danger. Alors soit. Il y a d’autres tarés embusqués, mais il faut continuer à vivre. Ils ne doivent pas réussir à instaurer un climat de terreur, parce que Paris c’est la ville des amoureux, et pas celle des attentats.
Le bateau est battu par les flots, mais ne sombre pas.
Nous ne sombrerons pas.
Nous ne capitulerons pas.
Inch’Allah.